Spiridon : le running en liberté, la course "wild" et inclusive
Odile Mopin | jeudi 23 juillet 2020
Il y a un petit côté libertaire réjouissant Spiridon. Une liberté de penser, un esprit de partage, de solidarité, nés du tréfonds des années soixante-dix. La jeune start-up Spiridon, lancée par Franck Tuil avec une équipe joyeusement variée de graphistes, marathoniens, communicants ... mixant les compétences, vient d’ouvrir son e-store. Il propose des maillots, tee-shirts et joggings pour la course éco-responsable, made in France et en Europe (conception entre Paris et Annecy, fabrication au Portugal) et puisés dans les archives de la riche histoire de Spiridon : pour les béotiens, le nom de modeste berger grec vainqueur du premier marathon des JO de l’ère moderne, a inspiré une revue mythique sur la course à pied, fondée en 1972 par le coureur Noël Tamini. Le site, très didactique, est d’ailleurs une mine pour les passionnés de course, jusqu’à la rubrique livre, musique et film proposée.
Il imagine, en précurseur, son magazine comme une tribune pour célébrer tous les coureurs, champions comme dilettantes, hommes, femmes, jeunes, anciens qu’il encourage à courir librement dans "une atmosphère de récréation, de convivialité et d’humanité qu’on ne trouvait pas dans l’athlétisme traditionnel". Une vraie communauté comme on l’entend aujourd’hui, mais avant l’heure. Inclusif, il intègre les femmes qui étaient à l’époque quasi ignorées de l’univers de la course, et les seniors. Dès 1972, d’ailleurs, la revue s’engage au côté de Kathrine Switzer, héroïne de la cause féministe aux Etats-Unis et l’invite même à participer clandestinement à la course Morat-Fribourg. Le droit des femmes à courir les mêmes distances que les hommes sera l’un des plus grands combats menés par la revue. Combat gagné en France en 1980, lorsque que les Femmes seront enfin autorisées à participer à des courses de plus de 5 000 mètres. En France, pratiquement rien ne se fait en dehors de la Fédération d’athlétisme. Spiridon contribuera à changer la donne en organisant les premières "courses libres". Le plaisir est une valeur de Spiridon :"la perf d’accord, la fête d’abord", telle est sa devise. C’est tout l’esprit Spiridon qui essaimera dans le monde entier chez les passionnés de course et donnera naissance à des produits dérivés, tel un maillot orange floqué d’un petit bonhomme aux pieds nus dessiné par Karel Matejovsky avec ce slogan « Courez avec nous ! ». Iconique.C’est cet ensemble de valeurs, le plaisir, le partage, l’inclusivité, la liberté, la nature, qui a séduit Franck Tuil, passionné de course et son équipe. L’homme qui vient du monde de la mode et de la musique, a notamment travaillé chez Comme des Garçons, et chez de grands labels. Il pense depuis quelque temps déjà à fonder sa marque de mode. En 2016, le film de « Free to run », de Pierre Morath, agit comme un électrochoc. « Si je veux faire quelque chose qui a du sens, alors je relance une marque Spiridon », se dit-il. Donc acte. Franck Tuil décroche la licence d’exploitation auprès des ayants droits et reprend contact avec le graphiste d’origine, Karel Matejovsky, resté proche de la communauté des coureurs. Il s’entoure d’un modéliste, d’un directeur artistique, finance lui-même son projet avec le soutien de quelques business angels.
La première collection, Archive, rend logiquement hommage aux pionniers du mouvement Spiridon et à tous les « spiridoniens » des années 1970-1980 qui ont fait souffler un vent de liberté sur la course à pied. Un socle de marque retrouvé. Les graphismes et illustrations qui ornent tee-shirts et sweat-shirts sont donc les créations originales du graphiste historique de la revue Spiridon. Bien sûr en cohérence avec l’esprit « course tout terrain » dans la nature, Spiridon est 100 pour cent durable, jusqu’aux étiquettes et emballages, se déclinant en deux lignes : sportswear en coton biologique et gamme technique en polyester recyclé, le tout pour femme, homme et enfant. Anthologie, la collection à suivre, s’inscrit dans la continuité, avec de nouveaux graphismes.« Des vêtements, conçus pour durer, qui ont du sens et invitent à mieux consommer, puisque nous produisons en petite quantité. Les collections sont des éditions limitées, pour lutter contre la surproduction et le gaspillage. C’était indispensable dans l’élaboration de mon projet, en plus de l’esprit si particulier à Spiridon », conclut Franck Tuil.
Crédit: Spiridon